Mes pattes éclaboussèrent le sol lorsque ces dernières rentrèrent en contact avec une flaque d'eau blafarde. Je courrai sans m'arrêter, sans savoir où j'allai. Tout ce que je savais, c'est qu'il fallait que je cours. Une sorte d'onde dangereuse me poursuivrait et mon instinct me hurlait de ne pas m'attarder. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine, mes poumons étaient en feu. Mes griffes cliquetaient contre la surface lisse des pierres sur lesquelles je passai parfois. Le vent glacial me plaquait ma fourrure contre mon corps, mais ma course effrénée m'empêchait de sentir le froid saisissant s'infiltrer sous mon pelage pour chercher à me transformer en statue de glace. Une crevasse apparut soudainement devant moi et je freinai, horrifié. Mes pattes avant cédèrent et je me vis commencer à sombrer dans l'abysse dont je ne voyais même pas le fond. Une douleur fulgurante me traversa la queue et je fus immobilisé, la moitié de mon corps pendant dans le vide. Les yeux clos, tremblant de tout mes membres, je ne prononçai pas le moindre mot. D'une force phénoménale, mon sauveur me jeta dans les airs et j'atterris sur un carré de bruyère, à bout de souffle.

"Tu parles d'un Lieutenant. Même pas capable de voir où il met ses propres pattes."

Cette voix. Je l'aurai reconnu entre milles sans problèmes. Une rage féroce se ranima en moi et j'ouvris les yeux. Mon frère était penché sur moi, une lueur moqueuse dans ses prunelles brûlées par la Forêt Noire. Que fichait-il ici ? Ne devait-il donc pas être mort ? Je feulai de rage, ne me demandant presque plus pourquoi il était là. J'avais mon explication. Tout ceci n'était qu'un rêve, les morts ne revenaient jamais à la vie comme ça. Ma queue fouetta l'air et mes oreilles se plaquèrent en arrière. Mais avant que j'eus le temps esquisser d'autres mouvements, Croc du Tigre s'évapora dans les airs en une fumée noire. Cette poudre âcre s'infiltra dans mes narines et, suffoquant, je perdis l'équilibre et m'évanouis.


Je me réveillai d'un bond, tremblant. Mon regard passa lentement sur les guerriers endormis près de moi. Ce n'était qu'un rêve. Un simple rêve. "Calmes-toi." Je me passai un coup de langue sur le museau. J'avais encore l'impression que le goût de la fumée m'envahissait le nez et la gorge à chacune de mes inspirations. Mais peut-être était-ce juste psychologique. Je me levai silencieusement pour ne pas réveiller mes camarades, m'ébrouai rapidement et sortis à pas feutrés de l'antre des guerriers. Je m'étirai longuement, satisfait de mes muscles sveltes et puissants. Je dirigeai mon regard vers le ciel encore assombrit. Pas une nuages en vue. Le temps idéal pour aller chasser dans les montagnes. Par ce temps, les aigles survolent beaucoup les pics enneigés, et avec un peu d'attention, nous, chats du Clan du Léopard, sommes assez agiles et sveltes pour en attraper.
Malgré le fait que je n'aime pas chasser en groupe, je ne souhaitai pas spécialement aller chasser seul aujourd'hui. Et le seul chat que je me voyais capable de supporter sans problème était mon Chef. Après un court instant de réflexion, je baillai et me rejoignis en quelques bonds l'antre de mon Chef. Je m'approchai lentement de l'entrée, hésitant à entrer. Cependant, je n'allai pas y pénétrer comme ça sans prévenir.

"Étoile Mystérieuse ? Je peux entrer ?"

« Chasse aux herbes »
Nuage Abyssal ~ Etoile Mysterieuse

              « Aides-moi… »

Un cri plaintif se fit entendre dans la clairière en feu et en sang…


Tu te réveillas en sursaut. La mousse humide de ta sueur te colla à la fourrure. Tu avais encore fais ce rêve. Ce rêve qui revenait chaque nuit. Chaque nuit il te hantait… M’enfin, ce n’était pas le moment de penser a cette nuit horrible. Tu te levas et commença à faire ta toilette. Tu enlevas les brins de mousse qui étaient accrochés à ta fourrure. Et tu regardas alors la litière sur laquelle tu dormais… La mousse était éparpillée dans toute la grotte dans laquelle tu dormais. Tu te levas une fois que les brins de mousse étaient enlevés de ta belle fourrure rousse. Tu allas réunir les brins de mousse éparpillés dans la caverne. Tu regardas alors le tas que tu avais formé.

« Étoile Mystérieuse ? Je peux entrer ? »

Tu sursautas. Tu reconnaissais cette voix. C’était Rêve Fantasmatique. Ton lieutenant. Que pouvait-il avoir à te dire ? Etait-ce au sujet des frontières ? Encore… ? Tu te tournas vers l’entrée de la grotte et affirma d’une voix sereine.

« Entre, je t’en-pris ! »

Une petit silence accueillit ma demande. Était-il en train de réfléchir à ce que je pourrais bien lui dire ? Rien de grave pourtant, il ne fallait pas qu'il s'inquiète. Je me passai un coup de langue sur la patte pour me la passer sur le visage, mais ce geste fut interrompu par une prise soudaine de parole. La voix semblait calme, chaleureuse et sereine. Je dressai les oreilles.

« Entre, je t’en-pris ! »

Je ne lui fis pas répéter deux fois. A quoi cela aurait-il servit ? Je pénétrai dans l'Antre d’Étoile Mystérieuse à pas prudent. J'avais beau souvent y mettre les pattes, j'étais toujours impressionné par la place qu'il y avait ici. Je m'inclinai respectueusement devant mon supérieur avant de m'assoir et d'enrouler ma queue touffue autour de mes pattes. Je cherchai autour de mon chef le moindre signe d'occupation. Si Étoile Mystérieuse était déjà en train de s'occuper de quelque chose, autant le laisser tranquille et oublier de lui demander de venir avec moi, juste parce que je ne voulais pas y aller tout seul aujourd'hui. Et pourquoi voulais-je de la compagnie aujourd'hui ? A cause d'un simple et stupide rêve. La gêne me prit soudainement à la gorge et je tardai à répondre. Voyant qu'aucune réponse ne lui venait, le mâle inclina la tête sur le côté, troublé. Mes moustaches frétillèrent et je clignai les yeux. Je haussai presque imperceptiblement les épaules et pris enfin la parole.

"Le temps est agréable aujourd'hui. Le soleil brille dans le ciel. Je pense que c'est le bon moment pour aller dans les montagnes, voir si l'on ne pourrait attraper des aigles. Y aller tout seul n'est pas forcément une bonne idée et j'aimerai savoir si tu pouvais venir avec chasser avec moi."

Je faillis m'arracher un rire à moi tout seul. Ça ressemblait franchement trop à une invitation de chasse, plutôt qu'une mesure de précaution. Si j'avais été seul, je me serai foutu une baffe. Au lieu de cela, je ne bougeai pas d'un poil, ne cillai pas une seconde. Mes yeux bleus glacés plantés dans ceux de mon Chef, je ne prononçai plus le moindre mot, ne fis plus le moindre geste, tant qu'à attendre qu’Étoile Mystérieuse se daigne à répondre, que ce soit négatif ou positif.